Politique cyclable : le vélo n'est pas que l'affaire des grandes villes
Politique cyclable : le vélo n'est pas que l'affaire des grandes villes

Politique cyclable : le vélo n’est pas que l’affaire des grandes villes

La ruralité n'est pas une excuse au tout-voiture

Article publié le jeudi 13 février 2020 à 09h08 et mis à jour à 09h56.

Longtemps, j’ai trouvé les retours sur le vélo en ville très urbano-centrés, voire parisiano-centrés. La plupart du temps, lorsqu'on entend parler de vélo utilitaire, les reportages ou les articles cherchent leur sujet dans les grandes villes. C’est plus facile, du fait de la densité et de l’avance de quelques bons élèves en la matière.

Mais qu’en est-il des espaces entre les villes, ou même des petites villes? La plupart du temps, l’automobile y est encore plus reine qu’en ville. Il ne s’y passe pas grand-chose d’un point de vue des déplacements, comme si ce n'était pas un sujet.

Dans ces conditions là, comment parler du vide ? Puisqu'il n’y a rien à montrer, les observateurs vont là ou il se passe quelque chose, c’est naturel.

Même le questionnaire Parlons vélo de la FUB, très utile au demeurant, reste sur des problématiques très urbaines. Les cyclistes sont plus concentrés sur les zones urbaines, alors les réponses seront forcément plus représentatives dans les espaces urbains.

La ruralité ne doit pas être une excuse au tout voiture
Exemple ici dans le petit village de Bergheim (2k hab.), Haut-Rhin (Alsace)

C'est l'article d’Olivier Razemon qui m’a donné l'idée d’écrire sur ce thème (Weelz en parlait aussi dans cet article). Le journaliste présentait les revirements et ambitions cyclables de maires de « petites » villes. Ça reste modeste, mais il y a des choses à mettre en lumière. Alors allons y !

Je ne suis pas un grand théoricien, je ne peux parler que de ce que je connais, mais j’ai un témoignage que vous trouverez peut-être intéressant, deux exemples contrastés séparés par une frontière.

Quelques km de séparation, un monde de différences

Des aménagements cyclables, il y en a si peu qu’on pourrait dire qu’il n’y en a aucun !

Je vis dans une petite ville du Nord, jouxtant une autre petite ville, à elles deux, elles doivent à peine atteindre les 8000 âmes dans une communauté de communes plutôt rurale. Dans ce territoire, les politiques cyclables des grandes villes, on n’en voit même pas une ébauche. Des aménagements cyclables, il y en a si peu qu’on pourrait dire qu’il n’y en a aucun !

Pourtant, il y a des cyclistes, des clubs de cyclotouristes, mais peu d’aménagements adaptés. Alors, évidemment, les cyclistes qui se frottent à ces routes sont tous plutôt expérimentés, et les néophytes ne sont pas vraiment encouragés à se lancer.

Il m’arrive de prendre mon vélo et de faire quelques kilomètres pour aller rouler en Belgique. Une fois la frontière passée, l'ambiance est différente.

Prenons l’exemple de Poperinge, en Flandre. D'après Wikipedia, la commune représente environ 19000 habitants. Mais vue la surface, le bourg au centre ne doit pas compter beaucoup plus de 10000 habitants. La taille de la ville, la topographie et les espaces ruraux qui les entourent sont tout à fait comparables à ce que je connais au quotidien. Pourtant les différences sont frappantes.

Des plaques de béton pas très confortables, mais une séparation de la route

Les voies cyclables sont souvent des plaques de béton étroites et inconfortables, mais le maillage est bon, et même les petites routes sont équipées. De plus, elles sont séparées de la chaussée par un petit espace herbeux. Les intersections avec les routes automobiles sont correctes.

"Il y a des parkings à vélo devant les écoles et les commerces"

Une fois dans la ville, les double sens cyclables sont généralisés. Il y a des parkings à vélo devant les écoles et les commerces. La ville est également en zone 30.

Des arceaux vélos un peu partout, surtout à proximité des commerces

Rien de très compliqué ni original n’a été mis en place. Individuellement, la qualité de chaque piste est médiocre. Dans ces espaces, la voiture conserve une place prépondérante, mais la place du vélo est visible et structurée.

Ça suffit pour voir la différence d’un point de vue de la pratique. Dans la ville, on voit des vélos un peu partout, posés contre les maisons, ou à proximité des commerces.

Les pistes cyclables sont obligatoires et prioritaires

A 30 km de chez moi, les jeunes gens peuvent se déplacer à vélo naturellement, librement et en sécurité.

L’impact réel de ces équipements, je l’ai vraiment ressenti un soir d’octobre. Je passais alors vers 17h dans les environs, et j’ai croisé des dizaines de collégiens ou lycéens, qui rentraient chez eux, dans la campagne environnante, à vélo. Pour tout dire, ça m’a sidéré…

A 30 km de chez moi, les jeunes gens peuvent se déplacer à vélo naturellement, librement et en sécurité. Cet aspect, qui me tient pourtant à cœur, m’avait complètement échappé ! Jusque là, je n’étais passé dans le secteur qu’à des heures creuses, n’y croisant que quelques cyclotouristes.

Des jeunes, des moins jeunes, et des vélos.

Je m'imagine mes enfants faisant la même chose. Ils passeraient pour des extraterrestres, et ma femme et moi passerions pour des parents inconscients et irresponsables ! Il suffit pourtant d’ouvrir les yeux et de regarder ce qui se fait.

Ainsi, il est possible que les enfants de nos villages se rendent au collège ou au lycée à vélo, ils ont probablement les mêmes jambes et les mêmes aspirations que leurs voisins belges. Encore faut il leur en offrir la possibilité. L’exemple de Poperinge montre que c’est la cohérence globale qui est efficace, même si c’est très largement perfectible.

A l’orée de cette année électorale, espérons que nos élus ruraux prendront conscience des enjeux et qu’on assistera à une amélioration de nos infrastructures et de la visibilité du « vide ».

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